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Blocage des centres de soin à Mayotte : « des patients vont décéder »

Blocage des centres de soin à Mayotte : « des patients vont décéder »

L'hôpital de Dzoumogé saccagé par des individus cagoulés armés de machette
L'hôpital de Dzoumogé saccagé par des individus cagoulés armés de machette
L'hôpital de Dzoumogé saccagé par des individus cagoulés armés de machette
L'hôpital de Dzoumogé saccagé par des individus cagoulés armés de machette

La semaine dernière le collectif des citoyens de Mayotte a multiplié les blocages contre des centres de soin. Ils protestent contre le refus des autorités comoriennes d’accueillir les personnes reconduites à la frontière et n’hésitent pas à s’en prendre aux patients. Une stratégie incompréhensible que la Préfecture de Mayotte semble cautionner.

Les faits : Des blocages en roue libre

Empêcher les malades d’accéder aux centres de soin, c’est la nouvelle stratégie du Collectif des citoyens de Mayotte. La radicalisation du mouvement est contestée par un nombre croissant de mahorais : « A quoi ça sert ? Les autorités comoriennes ne sont pas concernées par ces blocages, nous si ».

Au début de l’opération wuambushu un dispensaire a du fermer en raison de ces actions. Ces collectifs, principalement composées de femmes, passent plusieurs jours devant les portes des  établissements. Pour éviter les représailles, les directions font souvent le choix de fermer les lieux.

Début mai ces actions se multiplient. Les patients devant se rendre à l’hôpital de Mamoudzou ont été empêchés d’accéder à l’établissement, certains sont violentés par les collectif pro wuambushu. Le centre de soin de Jacaranda a du fermer ses portes jusqu’à nouvel ordre. Des dispensaires à Dzoumogné, Kahani et Pamandzi ont eux aussi subis des entraves.

La situation a dégénéré en fin de semaine dernière. Vendredi des jeunes ont décidé de s’attaquer aux bloqueurs. Ces derniers, après avoir empêché les soignants de travailler se sont réfugiés dans leurs locaux. Conduisant à des affrontements au sein même du centre médical de Dzoumogné. La préfecture a depuis mis en place un dispositif de sécurité, qui s’interdit néanmoins de déloger les bloqueurs.

Malgré cette mise en danger du personnel soignant, les collectifs annoncent poursuivre leur blocage tant que les navettes maritimes ne reprendront pas les expulsions vers les Comores. Sans que l’on comprenne comment l’entrave aux soins sur l’île de Mayotte pourrait infléchir la décision comorienne.

Dans une surenchère douteuse, les collectifs s’attaquent désormais aux accords commerciaux et humanitaires en bloquant les navires transportant des médicaments et de la nourriture vers les Comores. Des livraisons qui servent pourtant à réduire la pression migratoire en améliorant les services fournis dans les Comores. Là encore, la Préfecture refuse d’intervenir.

Les soignants sont désormais pris en étaux entre des groupes extrémistes et la délinquance. Ce mardi 16 mai un bus transportant des soignants a été attaqués par des jeunes. Selon La 1ère Mayotte l’évènement serait intervenu en réponse aux droits de retrait des chauffeurs de transport scolaire.

Les enjeux : Une mise en danger des malades

Sous couvert d’anonymat, un praticien témoigne auprès du Journal de Mayotte. Il précise que ces blocages sont effectués par une minorité. L’hôpital de Mamoudzou est par exemple bloqué par une trentaine de femmes depuis le 3 mai.

Leur revendication est surprenante « Tant qu’Azali bloquera, on bloquera ! » Le témoignage anonyme dénonce une radicalité qui met les patients en danger de mort « Depuis jeudi dernier le dispensaire de Jacaranda, situé en face du CHM, est fermé à cause du blocage. C’est dans ce bâtiment que se trouve la pharmacie du CHM et tous les médicaments nécessaires pour les consultations ainsi que pour ceux qui n’ont pas de sécurité sociale ».

Tout patient qui tente de se rendre dans l’établissement est bloqué, certains sont même violentés. Les visiteurs sont automatiquement considérés comme comoriens. Le témoin du Journal de Mayotte précise « Personne n’est venu les déloger pour l’instant. Même la police a ordre de ne rien faire a priori. Une trentaine de femmes qui bloque tout un système de santé dans l’île, je n’ai jamais vu ça, c’est inédit. Ce serait une chose totalement impossible en métropole »

Les conséquences pourraient être dramatiques. La distribution de médicaments contre le VIH et la tuberculose ne sont plus possibles et le suivi des patients atteints de cancer est interrompu « beaucoup de patients vont décéder ». Dans un communiqué publié le 16 mai, la Préfecture de Mayotte condamne les attaques contre les soignants, sans évoquer ces blocages. L’Autorité Régionale de Santé Mayotte conseille d’appeler le 15 en cas d’urgence. La population s’inquiète comme en témoigne Sala « Déjà que les hôpitaux sont saturés, si ils en rajoutent… ».

Concernant la délinquance, les agressions ne faiblissent pas. Établissements scolaires, maisons et voitures sont toujours attaquées. La population mahoraise s’interroge de plus en plus sur la stratégie des forces de l’ordre. Des discours complotistes apparaissent et accusent les gendarmes de complicité. D’autres propos s’en prennent à la justice qui empêcherait la gendarmerie d’agir. Pourtant les arrestations se poursuivent et les juges multiplient les condamnations. Mais la prison locale est déjà pleine et sans reconduite à la frontière, se pose désormais la question de l’application des peines.