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Le PKK n’est pas « le » peuple kurde, mais un groupe terroriste

Le PKK n’est pas « le » peuple kurde, mais un groupe terroriste

pkk turquie otan
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La Turquie a confirmé sa politique répressive sous Recep Tayyip Erdoğan. Judiciarisation de la presse, enfermement et répression amènent à déconsidérer par automatisme, toutes les positions de la Turquie. Après un conflit diplomatique, elle retire son veto concernant l’adhésion de la Suède.

Les faits : Les revendications turques face à l’adhésion de la Suède et de la Finlande :

Le 18 mai les deux pays nordiques ont officiellement déposé leur demande d’adhésion à l’OTAN. Elle fait suite à la seconde invasion Russe en Ukraine et aux discours des officiels du Kremlin, qui nient régulièrement la souveraineté de ses voisins.

Ce qui semblait renforcer la défense européenne fait ressurgir un dossier qui embarrasse plusieurs partis politiques : les soutiens plus ou moins directs au PKK, organisation reconnue terroriste par l’Union Européenne et l’OTAN. Erdogan déclare le 16 mai : « Aucun de ces pays n’a une attitude claire et ouverte envers les organisations terroristes. (…) Ils font entrer des terroristes dans leur Parlement et les laissent parler. »

Le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) est classé organisation terroriste par l’Union Européenne et l’OTAN en raison des nombreux attentats et crimes de guerre commis par l’organisation. Mais ces structures ont su médiatiser l’action de femmes-combattantes dans une région du monde aux politiques et exactions misogynes, ont participé aux combats contre l’État Islamique. Si bien que certains politiciens y ont vu une proximité avec les valeurs européennes.

La Turquie quand à elle demande l’extradition de 33 ressortissants kurdes présents en Suède au motif de liens avec le PKK. La membre du parlement Amineh Kakavareh est une personnalité centrale dans cette crise. Elle fut enfant soldat dès l’âge de 13 ans dans le Komala, région kurde d’Irak. Une communauté de 1000 personnes,  reconnue comme organisation terroriste par l’Iran et le Japon.

La première ministre suédoise, Magdalena Andersson est désignée par un vote du Parlement en 2021. la presse suédoise et le journal Efolket expliquent que des tractations auraient eu lieu pour obtenir l’aval de la gauche. Notamment à travers Amineh Kakabaveh et la promesse de développer les relations du pays avec le PKK et le YPG.

Fin juin la Turquie annonce la levé de son veto suite aux engagements de la Suède en faveur d’une meilleur coopération dans l’extradition des personnes accusées de terrorisme. Les dernières négociations se seraient déroulées en marge du sommet de l’OTAN à Madrid.

Ce n’est pas le premier conflit diplomatique autour de la question du terrorisme kurde. Puisque de nombreux autres partis politiques européens ont déjà soutenu le PKK lorsque la Turquie a bombardé des positions du groupe militaire. Ce fut notamment le cas du PCF en 2015, qui à travers Pierre Laurent demandait à la Présidence Hollande d’œuvrer pour retirer le PKK de la liste des organisations terroristes. Sans jamais traiter des exactions qui l’ont mené dans ce classement.

En 2020, la France Insoumise critique une action judiciaire enquêtant sur le financement du PKK dans le sud-ouest de la France. Jean Luc Mélenchon sans avoir eu accès au dossier judiciaire, dénonce immédiatement une « criminalisation des activités militantes de Kurdes en France par le Quai d’Orsay et le ministère de l’Intérieur bien alignée sur celle du dictateur turc. » Mais voilà, le financement du PKK est basé sur le racket de la diaspora kurde et implique donc bien d’enquêter sur les membres qui imposent un régime maffieux. La confusion de l’ensemble de la population sous le seul qualificatif de « peuple kurde » est une négation des exactions intra-communautaires.

Le contexte : Entre défense du peuple kurde et terrorisme

A travers la sémantique retenue par différents médias, on constate une confusion régulière entre le peuple kurde (30 millions d’individus) et les partisans du Kurdistan tels que le PKK et le YPG. Cette confusion engendre donc une solidarité quasi automatique avec le PKK lorsque ses membres sont recherchés par la justice. C’est d’ailleurs visible à travers les propos de Jean-Luc Mélenchon qui confond l’organisation et le peuple kurde dans son ensemble. Ou à travers les publications qui confondent les 33 demandes d’extradition envoyés à la Suède avec l’existence de 100.000 réfugiés kurdes dans le pays.

Une Turquie fondée sur l’ultra nationalisme :

En 1923, Mustafa Kemal Atatürk imagine une politique qui inspirera jusqu’à la décolonisation française : la réduction des frais de gestion impériale et la lutte contre les métissages culturels. Pour y parvenir il choisi de concentrer la nation Turque dans un périmètre réduit qui devra maintenir des liens de subordination sur les nouveaux États, tout en appliquant une politique d’acculturation forte sur les minorités. S’ajoute des mesures d’occidentalisation. Cette politique est appelée le kémalisme. Dans ce nouveau découpage territoriale, une forte population kurde est incluse dans le « noyau ». Et pour parvenir à ses fins, Atatürk criminalise la culture kurde.

En 1925 une révolte des kurdes musulmans éclate, menée par Cheïkh Saïd. L’Empire britannique soutien activement cette rébellion. Le dirigeant de la Turquie officialise l’alphabet latin, met fin à l’Islam comme religion d’État et interdit la polygamie. En 1930 le droit de vote est accordé aux femmes dans les municipalités puis aux législatives.

Mais lorsqu’il tente d’ouvrir le pays au multipartisme, à travers la création d’un factice parti d’opposition dirigé par l’un de ses proches, la mouvance islamiste galvanisée par les réformes contre la Religion d’État, prend en puissance. Il fait dissoudre le parti et s’enferme dans un rapports de force d’une part avec la communauté kurde à forte identité, et la communauté islamiste opposée à sa perte de pouvoir.

Une loi impose aux populations de prendre un nom de famille turc à partir de 1934. Quatre ans plus tard, 40.000 kurdes sont massacrés lors de la révolte de Dersim. Cette dernière intervient face à des déportations de la population et la construction de nombreuses casernes dans un territoire enclavé ; les montagnes de Dersim. Atatürk meurt la même année.

Erdogan reste un ultra conservateur et s’oppose aux actions militaires kurdes. Cependant en 2011, Erdogan prononce un discours historique où il présente des excuses au nom de l’État Turc pour le massacre de Dersim. Il sera fortement critiqué pour son action et n’est alors que le maire d’Istanbul. Mais certains membres de l’opposition kurde souhaitent plus de transparence sur l’identité des déportés et pour d’autres, une autonomie pour la région.

La répression des intellectuels kurdes :

Après la mort de Mustafa Kemal, les revendications kurdes sont passées sous silence. Les principaux leaders ayant été tués et la population fragmentée. Elles réapparaissent au grand jour à partir de 1958 et la fondation du journal Ileri Yurt, où des intellectuels kurdes dénoncent l’absence d’investissement de l’État dans l’Est du pays. Les revendications sont davantage basés sur les conditions de vie que sur la revendication ethnique.

Après le coup d’État militaire du 27 mai 1960, les putschistes durcissent la répression contre les expressions kurdes. De nombreux intellectuels sont enfermés et de nouvelles politiques d’acculturation sont appliquées dans les régions à majorité kurde.

Schisme et radicalisation dans les mouvements kurdes :

Isolé et martyrisé, le mouvement kurde de Turquie se rapproche de ses homologues irakiens et fondent le Parti démocratique du Kurdistan de Turquie (TKDP) en 1966. Une scission de l’organisation trois ans plus tard engendre la création d’une branche plus radicale. Les deux organisations s’affrontent à travers plusieurs assassinats, dont celui du leader Doktor Sivan.

En parallèle des luttes internes et division de la résistance kurde, le pouvoir turc cherche à intimider les paysans pour les dissuader de rejoindre la lutte séparatiste. A Silvan, 2000 gendarmes passent à tabac 3114 civils kurdes.

S’ensuit la constitution de deux modèles de lutte : un mouvement d’influence culturel kurde, public, proche des élus de la gauche nationaliste turque. Et un mouvement clandestin armé. Mais la gauche turque est partagée entre un soutien fort aux populations kurdes, avec qui elle partage la dénonciation d’un génocide culturel, et une branche qui considère que la révolution nationale doit passer avant la revendication kurde. C’est dans ce contexte que le PKK commence à se constituer dès 1973. Des militants et intellectuels kurdes revendiquent une lutte d’indépendance et la fin des relations avec les partis turcs. Engendrant un isolement politique et élargissant la défiance d’organisations turques, jusque là solidaire de la population opprimée.

La constitution du PKK :

Le petit groupe réalise des recherches en vue de fonder le nationalisme kurde autour d’un récit national. Et enquête pour observer les réalités sociales et diffuser l’ambition d’un soulèvement. Des tensions ont lieu avec des groupuscules gouvernementaux, avec les anciens camarades de la gauche turc et face à d’autres indépendantistes, tels que le KUK. L’organisation kurde Stêrka Sor assassine en 1977 l’un des membre du groupe qui deviendra PKK un an plus tard.

Après l’élaboration d’un programme qui se revendique marxiste, les premières actions du PKK consistent en une conquête politique sur plusieurs municipalités. Tout en préparant des militants à la lutte armée. Un élu du PKK est assassiné par un membre d’une tribu kurde. S’ensuit un affrontement armée qui débouchera sur la victoire du PKK. Est alors décidé de reproduire dans d’autres communes, cette stratégie de conquête politique, suivie d’une lutte armée.

Mais le PKK s’opposera à un autre clan bien trop puissant : le clan Bucak et ses 10.000 hommes. L’organisation subit plusieurs défaites.

Le PKK devient petit à petit comme ses homologues féodaux : il cherche à obtenir le monopole des revendications kurdes. La population n’a pas son mot à dire, elle doit soit choisir les tributs féodales, soit l’une des organisations révolutionnaires. Le KUK et le PKK vont ainsi s’affronter jusqu’à la défaite du premier.

En 1980 un nouveau coup d’état militaire amène au pouvoir une politique de génocide culturelle contre les kurdes. La langue kurde est interdite ainsi que toute expression politique se revendiquant de la communauté. La plupart des mouvements politiques kurdes s’éteignent. Le PKK domine alors les revendications à partir de deux théâtres : l’exil en Syrie et les prisons turques. L’autorité du pays fait l’erreur de rassembler dans les mêmes cellules les prisonniers d’une même organisation kurde. Permettant ainsi le développement et la structuration des recrutements pour le PKK. Des prisonniers s’immolent, d’autres lancent une grève de la faim.

Militarisation du Parti des Travailleurs du Kurdistan :

A partir de 1979 le PKK met en place des accords avec l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) pour entraîner les recrues. Elles participeront d’ailleurs à la résistance contre l’invasion israélienne au Liban. En 1984, fort de son expérience militaire à l’étranger, le PKK revient en Turquie et se lance à l’assaut de plusieurs villes en attaquant les gendarmes. Le  mouvement déclare le 15 août, fête national du Kurdistan.

Le PKK commence alors à distribuer des journaux et des chansons kurdes dans plusieurs villages. Il revient plusieurs jours après pour recruter les personnes sensibles à la cause. L’État met en place des services de sécurité dans les villages kurdes, qui s’appuient sur le recrutement des locaux. Leur mission consiste à repousser la guérilla du PKK et les organisations qu’elle a engendré. Mais pour s’assurer des recrutements, des exactions sont commises contre les villages refusant de rejoindre les « Protecteurs provisoires de village ».

L’État Turc semble désespéré face à la montée en puissance du PKK et va jusqu’à financer des tributs kurdes ayant assassiné des militaires turcs, comme le chef Tahir Adiyaman. La Turquie accélère donc ce qui était dénoncé par le PKK : le renforcement des pouvoirs tribaux comme axe de lutte contre l’indépendance kurde.

Mais voilà, dans cet affrontement entre une unité du territoire Turc et l’indépendance d’un Kurdistan tout aussi ethno-centré, il y a une population qui n’est plus en capacité de se déterminer autrement qu’au travers des menaces. Quid des kurdes voulant rester dans un Etat turc tout en ayant le droit d’enseigner leur langue et leur identité ? Ceux là, sont victimes et des bombardements turcs et des répressions du PKK.

Une propagande en Occident masque les exactions du PKK :

La complexité dans les rapports entre l’Etat et certains groupes indépendantistes sera masquée. A partir de 1990 le PKK met en place des bureaux d’information et de recrutement en Europe. Leur objectif consiste à diffuser une information favorable à la lutte armée du PKK, à recruter les réfugiés dans l’organisation et à obtenir des financements pour l’achat d’armes. C’est ce type de réseau que la Turquie dénonce par son véto contre l’adhésion de la Suède et de la Finlande.

En 1991 la Turquie suite à ses victoires militaires sur les zones contrôlées par le PKK, réalise de nouvelles déportations des populations kurdes vers l’ouest. Dans le but de couper les recrutements des indépendantistes et de réduire l’homogénéité des villages ethniques. L’effet produira au contraire un renforcement de l’adhésion au PKK. Plusieurs émeutes se dérouleront jusqu’en 1993 où des exécutions sont réalisés en confondant les émeutiers et les intellectuels kurdes. Ces évènements se déroulent sous la présidence de Turgut Özal, lui même d’origine kurde.

Turgut Özal souhaite mettre fin au kémalisme et négocier :

Face à l’échec pattant de la répression indifférenciée, le président turc déclare la fin du kémalisme d’Ataturk et décrète que la Turquie pour maintenir son unité nationale doit accepter les différences ethniques qui la compose. Une révolution de la part des autorités du pays.

La même année, il lance des négociations. Le 17 mai il se trouve au Liban en compagnie de Jalal Talabani, président du PKK. Turgut déclare dans une conférence de presse, l’entrée un vigueur d’un cessé le feu. Le président turc demande la fin de la lutte armée, son interlocuteur exige en retour l’amnistie générale, la reconnaissance constitutionnelle de l’identité kurde, la légalisation des partis politiques kurdes et de leurs activités, la possibilité pour les paysans de retourner dans leurs villages détruits ou évacués et une prise en charge par l’État des victimes du conflit.

La présidence turque fait face à son premier ministre et la branche ultra nationaliste fidèle au kémalisme. Mais obtient néanmoins une baisse significative des combats. Une nouvelle conférence et un renouvellement du cessé le feu est organisé et intègre plusieurs mouvements indépendantistes. Le président turc décède le lendemain de la conférence, le 17 avril 1993, avant d’avoir pu appliquer ses réformes conditionnant le cessé le feu. Un assassinat par empoisonnement est suspecté.

L’espoir d’une solution apaisée disparait :

Le 24 mai le PKK exécute 30 soldats turcs désarmés. La guerre reprend avec une forte intensité. L’autorité turque impose aux villageois kurdes de rejoindre les forces de sécurité. Les villages qui refusent voient leur population déportée et les bâtiments détruits afin que le PKK ne puisse pas s’installer. La stratégie de la terre brûlée devient la norme.

Le PKK accélère sa politique d’influence. Il crée une chaîne de télévision basée au Danemark, à destination de la diaspora kurde. L’organisation crée un Parlement et envoi des délégations auprès des députés de plusieurs pays européens.

L’extrême droite turque organise des milices réalisant des purges, avec l’accord tacite de l’État. Plusieurs élus et médias turcs condamnent ces violences. L’affaire Susurluk éclate et révèle des liens entre Sedat Bucak, député de la majorité, Hüseyin Kocadag haut gradé de la Police et Abdullah Catli, assassin et milicien d’extrême droite officiellement recherché par la Police. C’est l’avènement des loups gris, mélange de militants d’extrême droite et du renseignement turc, qui se chargeront d’assassiner les lobbyistes du PKK exportant la propagande de l’organisation et participant aux collectes de fonds.

L’Occident se divise sur la question kurde :

En février 1999 le président du PKK, Abdullah Öcalan est arrêté au Kenya. La procédure fait suite à une fuite du leader en Europe qui après des soutiens de la Grèce et de la Russie, s’est vu menacé de toute part par les pressions des États-Unis sur les ambassades européennes.

Changement de cap : des membres du PKK s’immolent en Europe et pratiquent l’auto mutilation. Conjugué à des attentats sur le territoire turc qui occasionnent des morts dans la population civile. La violence de l’organisation apparaît alors aux yeux d’une Europe pourtant sensible à la cause kurde. Et constate que ce que le PKK n’obtient pas se converti en violence immédiate.

Mais certains partis politiques tomberont alors dans ce qui est appelé le paradoxe de l’action collective, qui consiste à confondre un ensemble de population avec les actions spectaculaires de certains. Ce qui correspond bien à la confusion entre les actions du PKK et les droits des kurdes, qui amènent des partis politiques à poursuivre leur soutien au PKK même après son virage vers le terrorisme aveugle. Alors qu’il existe d’autres mouvements kurdes, qui n’ont jamais utilisé le terrorisme contre l’Etat, ni  les exactions contre les opposants kurdes.

Le Conseil Européen classe quant à lui le PKK dans la liste des organisations terroriste à partir de mai 2002. Une décision renforcée par l’ambition du PKK d’organiser en Europe la diaspora kurde dans des unités géographiques qui se superposent aux administrations européennes. La structuration de l’organisation qui cumule action politique et terrorisme inquiète.

Un certain nombre de membre du PKK demeurent pourtant fidèles à l’arrêt des combats et décrètent en 2002 la fin de la lutte armée. Un appel qui divisera davantage l’organisation dont certains membres poursuivent la lutte armée. L’État Turc refuse quant à lui toute négociation avec les héritiers du PKK et attaque toute position affiliée à l’organisation.

En 2013 intervient un nouveau cessé le feu par une négociation entre les services secrets turcs, Abdullah Öcalan et des cadres du PKK. A partir de 2014 les membres du PKK et du YPD s’illustrent en opposant une résistance farouche à l’État Islamique. Les images de femmes combattantes et le fait de résister à l’organisation terroriste marquent l’opinion publique internationale. A plus forte raison que le cessé le feu, même si enfreint en de plusieurs lieux, tant à réhabiliter les organisations kurdes.

Mais en 2015 l’État Islamique fait voler en éclat le cessé le feu en réalisant l’attentat de Suruc en Turquie qui fait 33 morts dans la population kurde. Des membres du PKK assassinent alors deux gendarmes turcs qu’ils suspectent de collaboration avec l’État Islamique. Sans aucun procès équitable, comme pour la plupart des exactions du PKK. L’État turc décide de répondre fermement et plus aucun cessé le feu n’aura lieu.

En 2015, les Forces de Défense du Peuple, branche armée du PKK, relancent les combats contre l’armée turc. Mais un changement colossal se produit par rapport aux précédentes insurrections. Les combats n’ont plus lieu dans les villages montagnards mais dans les centres urbains en raison du développement des régions kurdes. L’organisation distribue massivement des armes à la population mais la zone constatant une hausse de son niveau de vie est beaucoup moins sensibles aux appels du PKK que les villages reculés. Si bien que 500.000 civils préfèrent fuir les combats plutôt que de se voir imposé la guerre.

Les affrontements seront terribles. L’armée turque annonce la mort de 700 combattants du PKK. Le PKK annonce la mort de 4000 gendarmes turcs. L’exode a fortement réduit les pertes civiles. Amnesty International estime que 150 civils ont été tués entre 2015 et 2016. Plusieurs kurdes deviennent hostiles au PKK et dénoncent une action militaire qui ne pouvait rien apporter et leur faisait tout perdre. Désemparée, l’organisation militaire turque multiplie la répression contre les voix dissidentes. Devenant elle même la copie de ceux qu’elle avait combattu : les clans féodaux kurdes qui tuent plutôt que de laisser le droit à la contradiction.

A partir de ce moment le soutien d’élus européens au PKK se réduit drastiquement à chaque actualité relatant un assassinat, un enlèvement ou des enrôlements forcés par le PKK. Certains partis politiques n’actualisent pas leur analyse de la situation, dont des membres du Parlement suédois et français.

La Turquie ne pouvant produire de contrainte contre les élus des pays alliés qui soutiennent le PKK, ne dérogera pas de son veto concernant l’intégration de la Suède et de la Finlande. Ce veto lui permet de clarifier les enjeux de sa sécurité intérieure. Elle dénonce l’assassinat de 5500 civils par le PKK depuis sa fondation, ainsi que la destruction d’une centaine d’école, de plusieurs hôpitaux et infrastructures.
A cela s’ajoute des accusations des Etats-Unis contre plusieurs membres du PKK présents en Europe, pour participation au trafic d’héroïne. L’Union Européenne accuse quant à elle des membres du PKK d’avoir participé à la contrebande de cigarette à destination de l’Europe.

Pire encore et c’est là que les soutiens d’élus européens au PKK sont difficilement compréhensibles : en 2012 quatre membres du PKK sont mis en examen pour racket contre la diaspora kurde. Deux hommes ont déposé plainte après des menaces pour leur imposer à Marseille, la « Kampanya » : l’Impôt révolutionnaire du PKK. La Turquie par son véto dénonce aussi ce système de racket contre la diaspora, qui sert ensuite à financer l’armement terroriste.

En 2013 les services de renseignements turcs assassinent trois membres du PKK résidant en France. D’abord présenté comme une répression contre la population kurde l’enquête française a révélé que le bureau du PKK tenait des comptes sur l’argent qu’elle extorquait à la diaspora. Confirmant l’emprise maffieuse et la prise d’otage de l’organisation sur les kurdes.

EN 2014, le YPG fait l’objet d’un rapport de 107 pages d’Human Right Watch suite à l’assassinat de 9 kurdes, l’enrôlemment d’enfants soldats et le passage à tabac de ses opposants dans les zones syriennes sous contrôle des forces kurdes.

«  la police contrôlée par le PYD, connue sous le nom d’Asayish, semble avoir arrêté des membres de partis kurdes d’opposition en raison de leurs activités politiques. Dans certains cas, des membres de l’opposition kurde ont été condamnés, lors de procès apparemment iniques, en général pour avoir été prétendument impliqués dans un attentat à la bombe. »

L’alliance des forces armées kurdes met aussi en place des tribunaux dits populaires. Les juges y condamnent les opposants kurdes à partir d’aveux réalisés sous la torture. Un passage à tabac ayant occasionné la mort du détenu sera même qualifié par le YPD comme étant un suicide du détenu qui se cognait la tête contre le mur. Un témoin d’HRW affirme pourtant que le corps montrait des ecchymose au niveau des yeux et une coupure dans la nuque.

Ces évènements ont été masqués par les réseaux politiques de Bernard Henry Levy, du PCF et de la LFI. Tous ont présenté le même narratif : une force armée kurde féminine, humaniste et en lutte contre l’EI. Une post vérité qui a mis en avant une particularité minoritaire.

Une année plus tard le groupe est accusé de crime de guerre par Amnesty International en raison de la déportation et destruction des villages arabes. On comprend d’ailleurs mal comment des européens ont pu adhérer au projet de fondation d’un kurdistan ethnocentré et donc aussi xénophobe que le kémalisme.

En 2018 une affaire médiatique dévoile l’enrôlement d’enfants de 13 ans dans les forces armées kurde. Human Right Watch révèle l’interdiction pour ces enfants de communiquer avec leur famille. On parle alors de kidnappings.

Les enjeux : la convergence des intérêts sécuritaires au sein de l’OTAN

La Turquie dénonce les liens de proximité entre des élus suédois et le PKK et conditionne la levé de son veto à la fin des sanctions sur l’exportation d’arme vers son pays. Embargo ratifié par la Suède et la Finlande. Il est assez difficile d’imaginer une alliance militaire avec des membres qui s’interdisent la vente d’arme entre eux.

Même si le désir de voir une alternance politique en Turquie est compréhensible, on peut comprendre la nécessité pour une alliance militaire, d’avoir une position commune concernant les menaces. Car avec l’adhésion dans l’OTAN, un pays reçoit des données de Renseignement venus des autres pays. Il est donc difficile de maintenir ces échanges d’informations nécessaires à la Défense de l’Ukraine et à la lutte contre le terrorisme, si certains membres refusent de considérer les listes d’organisation terroriste retenue par l’alliance, au point d’offrir l’asile à certains accusés.