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La communauté internationale n’a jamais été aussi proche d’un programme social commun

La communauté internationale n’a jamais été aussi proche d’un programme social commun

taxe internationale
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Des changements de doctrine au sein de puissance mondiale ont modifié les rapports de force entretenus contre les pays critiqués pour leur imposition. Face aux délocalisations et au dumping fiscal, mais aussi devant la monté des extrêmes, les taxes internationales semblent être une réponse adaptée. Demeure néanmoins des États réfractaires.

Les faits : 130 eurodéputés se mobilisent pour taxer les ultra riches

Après sa victoire en faveur de la taxation des superprofits dans le secteur de l’énergie, un mouvement européen pour la justice sociale se mobilise pour une taxe internationale sur les ultra-riches. L’ambition mondiale du projet souhaite répondre aux mécanismes entravant les taxes sur les grandes fortunes. La contrainte est d’ailleurs régulièrement mentionnée par les derniers gouvernements qui ont allégé l’imposition des plus riches : le besoin de garder le domicile fiscal de ces derniers en France. Derrière cet argumentaire un choix cornélien : taxer pour redistribuer mais risquer de perdre des imposés, ou alléger les taxes sans avoir de redistribution à la hauteur des enjeux de santé, de sécurité et sociaux.

En phase de communication le collectif d’eurodéputées souhaite sensibiliser les opinions publiques. « Ce que nous avons réussi à accomplir pour les multinationales, nous devons désormais le faire pour les grandes fortunes », expliquent Aurore Lalucq et Gabriel Zucman dans une Tribune publiée au Monde le 14 mars.

Les fortunes concernées sont les personnes ayant plus de 50 millions d’euros et la taxe évoquée serait de seulement 1,5 %.

Le contexte : L’harmonisation fiscale internationale, un moyen d’éviter les délocalisations

Le système social français est régulièrement attaqué pour le coût qu’il représente pour les entreprises. La tradition fut longtemps de proposer une baisse des taxes et des droits sociaux. Les 130 eurodéputés en demandant un impôt dans les pays qui n’en appliquent pas permettent de réduire la concurrence fiscale qui pousse les entreprises et les grandes fortunes à se déclarer dans des zones franches.

Si il semblait improbable de coordonner les différents pouvoirs il y a plusieurs années, le virage de Joe Biden sur la taxation des multinationales a fait sauter la chape de plomb. Mme Lalucq et M. Zucman citent l’exemple de l’impôt minimum de 15% sur les bénéfices des multinationales, auquel près de 140 pays ont adhéré « quand tout le monde répétait que c’était impossible ».

L’OCDE met en place une taxe de 15% sur les multinationales :

Certaines recommandations et analyses statistiques peuvent aller contre l’idée que l’OCDE puisse servir de vecteur de justice sociale. Sa publication Les retraites en France et à l’étranger : 7 indicateurs clefs, sert par exemple de canevas à la rhétorique de la présidence française dans la réforme des retraites (lien).

Mais l’OCDE est aussi en charge de l’application d’une imposition mondiale. Le Secrétaire Général de l’organisation a publié son rapport à destination des membres du G20 en février 2023 et indique vouloir «  lutter contre l’évasion fiscale, améliorer la cohérence des règles fiscales internationales et garantir un environnement fiscal plus transparent grâce à la mise en œuvre du projet BEPS OCDE/G20 ».

Le projet concerne notamment un impôt minimum de 15 % sur les multinationales de plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaire. Plusieurs pays ont déjà initié des réformes en ce sens : Les membres de l’Union Européenne, le Japon, le Royaume-Uni, la Suisse, la Corée du Sud et Singapour. Joe Bidden fut très actif dans ces négociations. La France et l’Allemagne étaient cependant favorables à une imposition dont le plancher serait à 21 %. Ce qui leur aurait permis de mieux défendre leur propre fiscalité. Ils ont du faire un compromis pour obtenir la signature de plus de 140 pays.

Des mécanismes de redistribution sont à préciser. Le Secrétaire Général de l’OCDE a sa boussole « faire en sorte que les bénéfices soient taxés dans le pays où les activités économiques qui génèrent ces bénéfices sont exercées et où la valeur est créée ». 220 milliards de recettes fiscales sont attendus.

Face à l’économie numérique le plan de l’OCDE met en garde sur les crypto-monnaie qui constituent un risque de fraude fiscale pouvant entraver l’imposition mondiale. Pour le contrôle des fiscalités et l’action judiciaire l’OCDE encourage les accords bilatéraux et la transmission des dossiers entre les juridictions de différents pays. Ces accords permettent par exemple de détecter les montages financiers de la famille Pinault en Italie et en France. Cependant les autorités des deux pays ont la fâcheuse tendance à ruiner le travail d’enquête en proposant des amnisties fiscales. Dans ce cas traité dans un précédant article (lien) l’amnistie concerne un total de plus d’un milliards d’euros de réduction sur l’amende initialement établie pour dissuader et compenser le manque à gagner de l’État.

 

Les enjeux : Une mondialisation sociale ou le repli nationaliste

Cette approche à la fois sociale et locale de l’économie par une institution ayant fortement contribué à la dérégularisation, n’est pas apparue du jour au lendemain ni par la seule prise de parole du président américain. Outre les alertes des sociétés civiles sur les inégalités croissantes, des rapports du FMI préconisaient déjà un changement de doctrine internationale. Une réflexion faisant face à l’accroissement des pays en faillite et des plans de restructuration en échec. Le cas de la Grèce témoignait, dans un contexte de corruption et d’endettement, de la situation où le revenu lié à l’imposition n’est pas suffisant pour maintenir le fonctionnement et la stabilité de la nation.

La géopolitique joue aussi un rôle dans ces revirements. L’opposition aux effets pervers de la mondialisation est devenu l’essentiel du discours d’influence des États dictatoriaux tels que la Russie. S’ajoute, non sans lien, l’augmentation du poids de l’extrême droite dans les élections occidentales. Cette montée des extrêmes conjugue de nombreux facteurs, dont le rejet des dérégulations et réformes internationales. Le repli national profite donc d’une mondialisation perçue comme hostile et injuste.

Pour poursuivre les coopérations et l’ouverture sur le monde, les politiques ayant trait à la mondialisation doivent intégrer l’enjeu social sans se contenter de faciliter l’enrichissement des acteurs privés. Reste à voir si les États réfractaires à l’harmonisation fiscale rejoindront le projet de l’OCDE. Sans quoi ils continueront de chercher à vampiriser l’économie mondiale par le maintien de leur paradis fiscal.

Si le sujet vous intéresse Pragma Média peut réaliser un second article, plus technique, sur les détails du projet BEPS OCDE/G20 et cibler davantage les atouts et limites. Pour cela indiquez nous votre intérêt dans les commentaires sur nos réseaux sociaux ou par l’adresse de contact en bas de page.