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OTAN : La participation française au renforcement du flanc Est

OTAN : La participation française au renforcement du flanc Est

Exercice français en Norvège avec des soldats américains et allemands. Photothèque de l'OTAN.
Exercice français en Norvège avec des soldats américains et allemands. Photothèque de l'OTAN.
Exercice français en Norvège avec des soldats américains et allemands. Photothèque de l'OTAN.
Exercice français en Norvège avec des soldats américains et allemands. Photothèque de l'OTAN.

Si l’opinion publique française reste très éloignée du niveau de menace qui pèse sur l’Europe, les ministres européens de la Défense sont quant à eux confrontés aux hostilités répétées de la Russie.

Entre colis piégés envoyés aux ambassades, menace de tir nucléaire sur le Royaume-Uni, discours de conquête de l’Europe par les proches du régime et incitations expansionnistes dans les médias russes : les deux invasions en Ukraine ne sont pas les seuls signaux d’alerte.

L’OTAN a du repenser son dispositif de défense et de dissuasion en transformant des exercices irréguliers en opérations permanentes.  Le plan de renforcement du flanc Est répartie les forces dans les pays menacés par la Russie. Le Ministère français de la Défense a réalisé une conférence de presse ce 8 décembre afin de sensibiliser l’opinion sur ces engagements militaires. Au delà des livraisons d’armes, quelles sont les différentes actions menées par la France ?

Enhanced Forward Presence (eFP) : Un plan global pour répondre aux craintes des voisins de la Russie

Mise en place en 2016 suite à la première invasion russe en Ukraine, il s’agit du dispositif qui répartie l’envoie de troupes dans les pays frontaliers à la Russie. Au total 8 groupes de déploiement internationaux ont été définis pour les 8 pays hôtes qui sont l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie et la Bulgarie.

Carte réalisée par l'OTAN et diffusée en juin 2022.

Chaque groupe possède une nation-cadre qui assure la supervision des opérations. Ces fonctions à responsabilité tournent entre les pays membres afin de ne pas créer des situations de subordination entre nations alliées. La France participe au sein de deux opérations distinctes : La Mission Aigle en Roumanie et la Mission Lynx en Estonie.

 

Les craintes des pays membres L’eFP consiste à maintenir des troupes dans les pays menacés. Après les actions russes en Crimée, sans réaction militaire des pays européens, plusieurs nations ont douté de la solidité de l’alliance.

Si l’article 5 de l’OTAN oblige les pays membres à soutenir militairement un pays agressé, créant une situation différente de l’invasion en Ukraine, le traité de l’Atlantique Nord peut faire l’objet d’interprétation. Renforcée par les intérêts nationaux de chacun et la position géographique. La Pologne ne vit pas la menace russe de la même manière que la France ou l’Espagne.
Cette peur est renforcée par la stratégie du Kremlin qui exploite les failles du droit international (référendum d’autodétermination des peuples dans le Dombass), tout en utilisant des mercenaires constituant des groupes factieux (Crimée, Moldavie...). Elle pourrait par ces méthodes, agresser un pays membre de l’OTAN sans revendiquer l’agression.

L’eFP en maintenant des troupes dans les pays menacés, leur assure une intervention rapide quelque soit le cas de figure.

La mission Lynx et la Multinational Battlegroup Estonie

Intégré à l’enhanced Foward Presence Battle Group, la Mission Lynx est axée sur la défense de l’Estonie. Pragma Média présentait en juin l’un des exercices de déploiement sur préavis court. Qui consiste à réduire le temps nécessaire au décollage des forces française depuis l’hexagone vers une intervention en Estonie.

Ainsi le 21 juin, l’exercice Thunder Lynx décollait de la base Corse de Solenzara vers un bâtiment estonien à libérer. Un exercice décidé peu avant pour répondre à l’inquiétude croissante dans la région. Des exercices similaires ont suivi pour la centaine de militaire français basés dans le pays allié.

Le battlegroup dans lequel intervient la mission Lynx a pour nation cadre le Royaume-Uni et comprend outre la France, des militaires danois et islandais.

Ces opérations renforcent la coordination et la confiance. A l’approche des zones de déploiement, l’essentiel des données de reconnaissance provient du pays à aider. Avec deux langues officielles retenues par l’OTAN (l’anglais et le français) et 30 pays membres, mieux vaut aguerrir la communication.

 

Infographie sur la mission Lynx par l'Etat Major des Armées

La mission Aigle et la Multinational Battlegroup Roumanie :

Conjugaison entre les 500 soldats du bataillon français Fer de Lance, 300 militaires belges et 80 parachutistes néerlandais, l’opération Aigle est lancée 4 jours après l’invasion de l’Ukraine. En Mai le dispositif concentré autour de l’infanterie parachutiste reçoit le soutien du système de défense sol-air MAMBA.

Les unités françaises envoyées en Roumanie ont des compétences particulières. Elles sont équipées et formées aux risques Nucléaires, Radiologiques, Biologiques et Chimiques. Elles ont aussi la responsabilité d’entretenir des bases militaires qui serviront au ravitaillement et à l’arrivée rapide de renforts ouest-européens.

La France est la nation cadre de la Multinational Battlegroup Roumanie. Ce dispositif comprend aussi des forces américaines, néerlandaises, polonaises, portugaises et de Macédoine du Nord.

Infographie de la Mission Aigle par l’État Major des Armées

NATO Responce Force (NRF22)

La force de réaction rapide est sous commandement de la France depuis le 1er janvier. Il s’agit d’un dispositif qui organise le déploiement des troupes stationnées dans leurs pays d’origine vers les zones de front. Crée en 2002 lors du sommet de Prague, l’opération s’est régulièrement renforcée depuis.

La NRF22 est présentée par le ministère de la Défense française comme « une force de frappe multinationale pouvant être déployée sur court préavis, prête et autonome, composée de forces terrestres, aériennes, maritimes et de forces spéciales. » Elle est ainsi spécialisée dans la réponse immédiate à des attaques massives sur le sol européen. Les militaires participant à la NRF reçoivent une formation préalable de 6 à 18 mois pour assimiler les standards OTAN (matériels, normes et protocoles d’interopérabilité entre les 30 nations membres).

La France met à disposition 7700 soldats sur les 20000 militaires de cette force déployable en moins de 7 jours. L’opération comprend un déploiement plus rapide en 2 jours, qui se compose de 5000 hommes : la Very High Readiness Joint Task Force. Les affectations durent un an, par roulement, pour permettre à un maximum de soldats d’être en condition d’intervention. Depuis 2004 se sont donc plusieurs centaines de milliers de soldats qui ont été formés.


Contexte : Une réthorique russe contre la légitimité des pays de l'ex URSS

Le niveau de mobilisation préalable à un conflit peut surprendre les personnes non averties sur la politique intérieure russe et ses relations diplomatiques houleuses. La souveraineté des pays de l’ex URSS est régulièrement contestée par les discours du gouvernement russe qui les considère comme des anomalies historiques.

Ce discours envoie le signal d'une volonté de refonder les frontières de son empire perdu. Cette approche repose sur l'endoctrinement qui néglige les origines historiques et nationales de nations antérieures à la Moscovie, entité qui fera naître l’Empire Russe. La Moscovie a connu 3 siècles de colonisation par la Horde d’Or. C’est en se soumettant à cette colonisation que la future Russie a pu étendre son territoire contre les nations qui résistaient aux invasions mongoles. Avant de prendre son indépendance en capitalisant les annexions réalisées aux côtés de la Horde d'Or.

Avant la pénétration mongole, la région de Moscou était un comptoir commercial puis un fort, dépendant de la Principauté de Kiev. Loin d’une anecdote, ces évolutions des nations européennes sont constamment négligées par le discours national russe. Pour asseoir une sémantique expansionniste qui travestie l’Histoire par un récit quasi-mythique autour d'une Russie mère des nations ouest-européennes.

Air Shielding :

Evolution de la barrière anti missile, le dispositif est officialisé en août 2022. Il exerce l’aviation de l’OTAN tout en permettant de maintenir une présence permanente dans le ciel. L’objectif est de pouvoir contrer les attaques aériennes de l’aviation et des missiles russes. Air Shielding n’est pas une opération à proprement parler mais une stratégie qui s’étend de la mer Baltique à la Mer Noire. Outre les chasseurs et avions de reconnaissance, il comprend les dispositifs anti-aériens présents au sol.

Au sein de cette stratégie on retrouve l’opération Enhanced Air Policing. Une mission de Police du ciel. La France y participe en mettant à disposition 4 rafales issus de Mont-de-Marsan et Istres. Ils peuvent parcourir 6000 kilomètres en 7H et sont parfaitement adaptés au ravitaillement en vol. Grâce aux rotations du personnel, plus de 200 aviateurs ont déjà participé.

Standing NATO Maritime Group 1 & 2 :

Non spécifique au flanc est de l’alliance, leur composition change avec le temps. Actuellement des navires norvégiens, américains, français, espagnols, italiens, danois, grecs et turcs en font parti. Outre la prise d’expérience, l’objectif de ces flottes repose sur le maintien des axes de communications maritimes. Il s’agit d’une force très mobile avec un large périmètre d’intervention. Avant de se positionner en Atlantique, le Group 2 participait à l’opération Active Endeavour, en Méditerranée.

A noter que le Group 1 réalise déjà des exercices en coopération avec la marine Finlandaise et Suédoise. Jeanne Morang, responsable de la flotte néerlandaise a déclaré à la suite de ces essais « ces exercices montrent notre cohésion et notre compréhension mutuelle des tactiques et méthodes, autant que notre interopérabilité. Une dissuasion crédible nécessite de l’entraînement, qui nous permettra d’être fort, ensemble. »

CLEMENCEAU22 et la mission Antares :

Le Groupe aéronaval français (GAN) est déployé en Méditerranée. D’abord affecté aux missions de lutte contre le terrorisme notamment en Irak, le porte avion Charles de Gaules et son escorte permettent des missions défensives en Croatie, Bulgarie et Roumanie. L’une de ses fonctions consiste à surveiller la flotte russe et identifier le niveau de menace en méditerranée.

Avions de détection radar au sein du Groupe aéronaval français. Photographie de l’État Major des Armées.

Ndlr : Les données numériques sur les effectifs sont à considérer avec prudence. Il n’y a pas d’actualisation en temps réel des forces déployées. Les données chiffrées diffusées par la Presse ne représentent pas l’ampleur des dispositifs. En effet les militaires sont envoyés par roulement et le cumul du personnel formé et déployé n’est donc pas représentés. Les cartes que nous mettons à disposition dans cet article proviennent du Ministère de la Défense française et de l’OTAN qui indiquent ne pas être des représentations exactes. Ces éléments sont des communications publiques à un instant T, confrontées à l’évolution de la situation, des accords et aux rétentions d’informations en lien avec les divers niveaux de Secret Défense.